Un nouveau rôle pour l'architecte est en train de se mettre en place : il participe à la co-production comme technicien, organise, planifie à l'intérieur d'un processus extrêmement structuré et co-opératif auquel clients, investisseurs, utilisateurs et consultants techniques prennent tous part. Ce nouveau rôle va de pair avec une nouvelle redistribution des compétences. Pressurisée par les forces du marché et par ses propres besoins de prise en charge, l'architecture du XXe siècle était portée par des arguments légitimants. Ceux-ci ont finalement miné la continuité d'une pratique architecturale indépendante (..).
Cette approche est pragmatique au sens où elle traite de conditions publiques, économiques et sociales réelles, mais il s'agit résolument d'un pragmatisme interactif.(…) Une réponse simple, opportuniste à ce qui est demandé est impossible dans le cadre de la complexité considérable d'un projet vaste, qui implique de nombreux clients. De même, une idée préconçue de l'urbanisme, qui précéderait les spécificités de l'emplacement, du programme ou de ses usagers, ne peut être que redondante. Au contraire, le projet doit émerger de manière interactive (…).
Planifier en profondeur implique l'articulation émergente d'une politique de la mobilité et l'incorporation dans l'architecture des dimensions du temps. Cette approche s'applique particulièrement aux projets et lieux qui sont riches en significations, chargés en structure et regorgeant de mouvement potentiel.(…) L'usage combiné de la conception automatisée et des techniques de l'animation autorise une méthode de travail qui intègre les questions du mouvement de l'usager, de la planification urbaine, de la construction, et les potentialités du programme de se développer à plusieurs niveaux à l'intérieur de ce réseau. Les nouvelles techniques informatiques permettent de faire apparaître une multiplicité de couches d'expériences ainsi que d'activer cette connaissance de façon nouvelle. Quand on cartographie le mouvement, la relation programmatique au temps n'est pas compartimentalisée, mais reflète un temps synchronique, continu. Si des strates infrastructurelles séparées peuvent être classifiées, calculées et testées individuellement, c'est pour être ensuite entrelacées afin d'accomplir à la fois des flux effectifs et une interaction effective. Les conditions temporelles sont ainsi connectées aux thèmes programmatiques à travers la simulation de la même manière non-segmentée avec laquelle le temps s'écoule dans une situation réelle.
La capacité de saisir le processus de collecter, structurer et centraliser la profondeur et la richesse de l'information publique place une fois de plus l'architecte au centre de son propre monde. L'architecte comme scientifique public est un concept ni objectif ni subjectif, ne venant ni avant ni après la théorie ; ni théorique ni opportuniste. Ne dépendant plus de la valeur subjective du "talent" ou de la rationalité des choix de conception, l'architecte coordonne les différentes parties qui adoptent différentes places dans le domaine public et recourt à des tactiques et techniques spécifiques pour, une fois de plus, franchir le pas radical vers l'ouverture d'une vision.

La perpétuelle orientation de la maison vénitienne vers l'eau génère une parade de palais dans une relation radiale aux quais continus entourant les îles. L'emplacement de l'entrée du nouveau bâtiment, abritant un centre culturel pour l'Université de Venise, répond à cette orientation. Tous les axes de circulation de cette zone sont dirigés vers la nouvelle entrée, établissant une relation diagonale forte avec le bâtiment existant de l'Université et avec la ville à travers cette nouvelle proposition. Le noyau du projet est pensé dans la continuité de la voie publique. Diagrammatiquement la forme linéaire du quai est aspirée à l'intérieur, soulevée d'un bout à l'autre pour former un tuyau elliptique, avant qu'elle ne se retourne dans le volume du toit au sommet, organisant de l'intérieur la distribution du programme. La force du noyau est basée sur la typologie organisationnelle du palais vénétien traditionnel, dans lequel le grand salon commande tous les autres espaces.

Ce laboratoire est conçu à la manière d'un pavillon. Il est consacré à la NMR (Neutron Magnetic Resonance), une technique de recherche qui analyse la structure et le comportement de protéines à travers l'utilisation de pulsations magnétiques à haute fréquence. Ce nouvel équipement nécessite huit spectromètres, une console et un tableau de contrôle. L'utilisation d'aimants implique des contraintes architecturales spécifiques. Ils génèrent des champs magnétiques de différentes intensités, dépendant de leurs fréquences propres. Ces champs sont sensibles au mouvement, au types de structure et d'installation, etc. N'importe quelle irrégularité à une distance particulière des aimants perturbe les résultats du test. D'un autre côté, la radiation magnétique affecte aussi les personnes, les ordinateurs, les cartes de crédit, les pacemakers, etc. C'est pourquoi l'emplacement des aimants détermine l'organisation du cœur du bâtiment. Le rayon magnétique informe la structure et la surface, dirige le programme et l'équipement, et affecte la circulation intérieure.

Le bâtiment est constitué d'une spirale orientée horizontalement dont les extrémités s'enroulent en son milieu pour générer l'organisation interne. Différencier la spirale permet de créer des zones tampon entre les fonctions ainsi que de satisfaire les différents besoins spatiaux des diverses parties du programme. La spirale est conceptualisée dans tout le bâtiment, et ne réside donc pas seulement dans les coupes. Elle est conçue en 3-D, voire en 4-D, étant l'élément qui conduit le mouvement au travers du bâtiment. La figure archétypale de la spirale est étroitement liée à la musique : rythme, continuité, canaux, directionalité, intersections. Centrale dans la conception du bâtiment on trouve une grande salle qui peut être utilisée de manière flexible comme lieu de travail, salle de concert ou de théâtre. Cette salle, envisagée comme une "boîte noire", est accessible depuis l'entrée principale au rez-de-chaussée sur le côté sud du bâtiment à travers un foyer en pente qui s'éléve jusqu'au premier étage.

Grâce à l'élongation de ses lignes, cette maison privée crée un lien avec les différentes caractéristiques de son environnement ; la "boucle" spatiale permet à la maison de s'approprier les dimensions extrêmes du paysage. Etirée au maximum, au lieu de faire valoir une forme imposante ou compacte, la maison véhicule depuis l'intérieur l'idée d'une promenade dans la campagne (l'effet Kröller-Müller). L'anneau de Mœbius, dont la qualité spatiale permet d'être présent à la fois en plan et en coupe, imprime à l'intérieur un cycle de 24 heures de sommeil, de travail et de vie. Alors que la "boucle" rend réversible le dedans et le dehors, la matérialisation elle-même accompagne ces changements : les détails de vitrages et les éléments structurels en béton échangent leurs rôles respectifs. Certaines façades vitrées sont placées en face de la construction en béton, certains murs de séparation sont en verre, le mobilier, tels que tables et escaliers, est en béton.