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Depuis plusieurs années, Boris Sieverts
propose des “ voyages urbains ”, à pied ou à
vélo, d’une ou de deux journées, aux marges de la
vision habituelle de la ville, afin de révéler ce que l’on
n’y voit plus : ici plantes, venelles, zones industrielles, chantiers,
donnent naissance à une nouvelle perception de la ville, poétique,
fragmentée, et pourtant bien réelle.
Au travers des récits que Boris Sieverts livre de la périphérie
urbaine et notamment de la périphérie de Cologne, située
sur la rive droite du Rhin, Boris Sieverts consigne avec minutie les situations
et les rencontres. Il analyse les sensations que celles-ci font naître
et tente de formuler le projet qui sous-tend ses excursions dans ce type
de territoire si complexe : le projet d‘une "densification
poétique" (verdichten) de ces lieux en transformant leur perception
habituelle. Boris Sieverts s’attache et se concentre sur ces "terrains
vagues", espaces intrinsèquement forts, comme l’ensemble
du paysage de la périphérie, dans l’expression de
l’absence de forme préconçue et d’appropriation.
Un nouveau regard naît d’un cheminement sélectif à
travers les "terrains vagues".
Tankstelle
L’agence allemande Büro für Städtereisen organise
depuis plusieurs années des promenades, des dérives urbaines
à Cologne essentiellement, mais aussi en banlieue parisienne, à
Nantes, dans le bassin de la Ruhr et, dans le cadre d’ArchiLab,
à Orléans. Boris Sieverts y opère comme guide de
randonnées pédestres ou à vélo dans les marges
de la ville, les friches, les zones industrielles, les aéroports,
les parkings, les gravières, les décharges, les chantiers
de démolition, les sorties d’autoroutes, etc; dans tous les
lieux situés entre le centre-ville cultivé et la campagne
cultivée elle aussi. Le choix très sélectif de ces
périples -que l’artiste met des mois à baliser, obéit
à deux critères : le premier concerne la qualité
des traces inhabituelles laissées par tout être vivant et
fréquentant ces zones libres de tout contrôle, que Sieverts
nomme “ biotopes humains ”. Le second a trait à la
qualité plastique de ces espaces en apparence sans forme, à
leur capacité à révéler l’inexploré,
depuis le sublime jusqu’à l’élément le
plus insignifiant. Cette nouvelle perception se nourrit des séjours
effectués dans ces lieux, de l’étude de leur histoire,
de l’analyse des cartes et de prises de notes. Tentant de rendre
compte de la complexité des situations nées dans ces périphéries
contrastées, d’en livrer la densité poétique,
Boris Sieverts développe un travail photographique qui vise à
fixer bien plus que des anecdotes mais une conception mentale du lieu,
conception qui n’a de cesse de transformer la perception habituelle
que nous avons du monde. La suite syncopée des prises de vue -on
passe du public au sauvage puis au cultivé- renforce la singularité
de chacun des paysages ou des bâtiments en leur conférant
un caractère " d’épiphanie " tout en favorisant
des rapports inédits. La série des photographies de bâtiments
“ découpés ", des constructions archétypales
sans qualité arrachées à un environnement insignifiant,
exacerbe la présence des façades, leur façon d’
“ être là ”, en tant que cliché et en
tant que réalité.
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