Bas Princen (1975) Pays-Bas
 

 

 

Les photographies de Bas Princen sont des saisies anthropologiques de nouveaux modes comportementaux. Ainsi, à travers l’internet, des personnes se donnent rendez-vous pour se livrer à des activités parfois absurdes. Pour Bas Princen, les lieux sont aujourd’hui bien plus façonnés par ces activités issues des équipements et des nouveaux systèmes de communication que des processus d’urbanisation.

Architecte et photographe néerlandais, les travaux de Bas Princen montrent des morceaux de paysage, non comme une illustration de la réalité mais comme des images d’une réalité potentielle. Il photographie souvent des lieux que l’on ignore, trop délaissés pour que l’on puisse parler de nature, des lieux dont on a oublié depuis longtemps la fonction initiale même s’ils en ont gardé des traces. Ce qui l’intéresse et qu’il photographie c’est l’appropriation de ces lieux et les traces d’activités qui les révèlent dans leur vraie nature, leur donne une nouvelle réalité. Ce sont les mutations du paysage qui, à travers de nouveaux usages, souvent éphémères, prennent une signification différente. Bas Princen participe au projet de recherche Shrinking Cities International Research organisé par Philipp Oswalt en tant que photographe au sein de l’équipe d’investigation sur le site d’Ivanovo en Russie. Bas Princen est l’auteur d’Artificial Arcadia paru en 2004. Le travail de Bas Princen sera exposé à la Biennale de Venise en 2004.

Artificial Arcadia

La quarantaine de photographies qui constitue la série Artificial Arcadia scrute avec grande minutie les mutations du paysage hollandais d’aujourd’hui. Bas Princen parcourt le pays en observant des petits groupes de gens dont le voisinage ou les intérêts communs très spécifiques leur ont permis de se rencontrer -par le biais d’Internet, l’envoi de SMS par exemple- et de se retrouver ensemble en des lieux temporairement abandonnés, souvent en périphérie de la ville, des vieilles carrières, des secteurs de l’armée délaissés, des décharges de sable ou des emplacements de remblais (particulièrement dans le nord du Brabant ou dans les plaines de sable de Maasvlakte près de Rotterdam). Ainsi, pêcheurs, ornithologues, rockers, surfers, trialistes, joueurs de golf, de paintball, amateurs de cerfs-volants, etc, se livrent-ils à leurs activités de loisirs, pour un moment, dans des espaces publics dont ils ont détourné l’usage habituel, parfois de manière illégale. Selon Bas Princen, nos modes de vie et de rencontre aujourd’hui sont bien davantage déterminés par les équipements et les systèmes de communication qui entourent l’individu que par les lieux mêmes. En effet, c’est le produit qui crée le paysage, qui rend attentif aux spécificités des lieux : un conducteur de 4x4 ne regarde la forêt qu’en fonction des possibilités qu’il a de passer, avec son engin, entre les arbres; le surfer n’attend que les conditions optimales de houle venant du nord-ouest, entre marée haute et marée basse, pour s’adonner à son hobby; l’ornithologue accourt sur la côte de la péninsule pour cocher un Silvia Undata échoué après un orage. Le paysage perdrait-il alors toute nécessité de planification ? Bas Princen aiguise notre perception à travers des situations souvent étonnantes, voire étranges, découvrant d’une part, la manière dont les groupes s’approprient, transgressent et recyclent ces territoires en fonction de leurs besoins, et, d’autre part, les mutations du paysage résultant des traces laissées par leur activité. Mais c’est aussi la notion d’espace public qui est interrogée ici : les lieux utilisés pour des activités de loisirs " sauvages " engendrent, de fait, un processus de programmation, si provisoire soit-il.