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Ces architectes proposent un penthouse au luxe
tapageur, inspiré de la culture Hip-Hop en plein Harlem qui, de
bastion de l’Amérique noire, est devenu un nouveau territoire
pour les classes aisées. Ce " fabuleux ghetto " témoigne
de cette mutation d’identité.
Le projet The Ghetto Fabulous mené par PHAT est présenté
au Studio Museum de New York en début d’année 2004.
L’exposition, intitulée Harlemworld : Metropolis as Metaphor,
se concentre sur le quartier de Harlem et sur son évolution en
invitant plus d’une douzaine d’architectes afro-américains
à présenter leur projet à travers des supports visuels
comme la photographie, la vidéo ou des installations PHAT a précédemment
proposé un projet pour le concours du Korean Museum of Art.
Harlem : the Ghetto Fabulous
Présenté à New York en 2004 dans le cadre d’une
exposition intitulée Harlemworld : Metropolis as Metaphor, le projet
conceptuel de PHAT propose, dans un vidéo-clip spectaculaire inspiré
de la culture Hip-Hop, un penthouse au luxe tapageur. Doté d’une
piscine, d’un jardin et de très vastes espaces intérieurs
affichant, pour certains, les cours de la bourse, il occupe la totalité
du sommet d’un building de Harlem. Oxymore, le titre du projet nous
place au cœur d’un paradoxe : bastion de l’Amérique
noire, du Funk, du Rap et du Hip-Hop, quartier dont la concentration en
logements sociaux est la plus dense des États-Unis, zone qui exprime
l’injustice d’une ségrégation socio-géographique
depuis les années 1930, Harlem s’est radicalement transformé
dans les années 1970 sous la pression de promoteurs immobiliers
qui ont contribué à la " gentrification " et aux
rénovations urbaines, favorisant de la sorte le retour de classes
sociales aisées qui avaient déserté le quartier dans
le passé. Ainsi, ce " fabuleux ghetto " désigne
avec force la mutation complexe de l’identité même
de Harlem, en proie, comme nombre de mégalopoles, aux franchises
internationales. Plaqué sur fond de paysage urbain jonché
d’immeubles édifiés par la classe blanche dans le
cadre d’un contrat social civique, ce luxueux, ce " fabuleux
" club ne fait qu’exacerber, non sans ironie, la mutation radicale
de ce quartier puisque nombre de ses nouveaux riches (rappeurs entre autres)
sont précisément issus de ce ghetto. Hétérotopie,
contre-emplacement, le Ghetto Fabulous rend criante la fragmentation de
la ville. Le projet de PHAT procède en effet d’une stratégie
de la collision et de la discontinuité : le privé se mesure
ici à l’échelle de la ville, le déploiement
indécent des surfaces du penthouse contredit la compacité
du quartier, l’ostentatoire artificialité dénonce
la pauvreté architecturale et humaine de l’habitat, le "
fabuleux " s’y définit désormais comme nouvelle
identité. |